Yoli est arrivée, sans se presser .. OU PAS ! En fouettant chevaux et cochers après avoir appris la nouvelle de la convalescence de son frère à Ménessaire.
— Qu'on fasse appeler la Princesse !
On fait mieux qu'appeler la princesse, on conduit la petite boule rose qu'est plus rose mais noire auprès de ladite princesse, à savoir dans son bureau.
— VOTRE ALTESSEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEUH ! IlS ME L'ONT TUÉ ! DITES MOI TOUT !
Yolanda Isabel se jette dans les bras de l'Altesse en question.
— Je serai forte !
Menteuse.
Armoria de Mortain reçoit tant bien que mal le colis - piégé ?
— Allons, allons, Yolanda... D'abord un peu de calme : c'est plus facile pour écouter...
Armoria fait un signe au valet, qui détale pour aller chercher des douceurs. Mais pas de macaron. Ni de chouquette.
— Il est vivant, hein ?
Yolanda Isabel commence à trembloter de la lèvre inférieure.
Armoria de Mortain s'empresse de répondre.
— Il est vivant, oui.
Elle s'empresse d'ajouter.
— Mais...
— Mais..
Yolanda Isabel commence à gémir.
— Il est encore faible... Et il se fatigue aisément : ils l'ont fort mal traité, tu sais.
Yolanda Isabel renifle un gros coup avant de se redresser.
— S'il n'avait pas quitté la Bourgogne, ça ne serait JA-MAIS arrivé !
Armoria de Mortain hoche vigoureusement la tête.
— A qui le dis-tu, mon enfant ! Je t'amène le voir, si tu veux - mais il faudra me faire une promesse, pour son bien.
— Tout ce que vous voulez ! Il vous doit la vie !
Armoria de Mortain sourit.
— Il ne faudra point rester trop longtemps... Je sais bien qu'il te manque, et que ce sera dur de ne le voir que brièvement, mais sa santé avant tout, n'est-ce pas... Et je *sais* que tu es assez grande pour comprendre cela.
Yolanda Isabel se rengorge un peu.
— Je pourrais revenir une autre fois ? Un peu mais souvent comme ça.
— Bien entendu... Si tu respectes ta promesse : et sur ce point je n'ai aucun doute.
Armoria de Mortain se lève après l'avoir doucement déposée à terre.
— Prête ?
— Oui.
Armoria de Mortain la guide dans les couloirs de Ménessaire - qui ne sont ni trop nombreux, ni excessivement longs - jusqu'à la porte d'Aimbaud, à laquelle elle frappe doucement, après avoir chuchoté à Yolanda :
— Ne dis rien, nous allons lui faire la surprise de ta venue.
Yolanda Isabel glousse un peu.
Aimbaud laisse tomber la bande-enluminurée qu'il essayait de lire malgré la somnolence, et tire d'avantage la tronche (s'il est possible), s'attendant à une nouvelle venue de l'altesse pour lui faire avaler un remède dégobillatif.
— Oui ?
Armoria de Mortain passe la tête par la porte, sourit gentiment.
— Un peu de distraction vous ferait plaisir, Aimbaud ?
Aimbaud se frotte l'oeil d'une paume de main, la figure pâle avec un hématome aux couleurs variées sur une joue.
— Mouais...
Yolanda Isabel fronce le nez, comment ça "mouais"...
— Je ne sais pas si cela vous plaira, mais...
Armoria de Mortain avance et ouvre la porte en grand - prenant le soin de ne pas se trouver sur le chemin, pas folle, la guêpe.
— ... vous avez de la visite.
Aimbaud se redresse légèrement à l'aide des bras et regarde.
Yolanda Isabel se rue en courant vers la paillasse de son frère pour se pendre à son cou. Ah bon, convalescent ?
— A MOOOOOOOOOOOOI !
— HhhmmNNFFfgniinmgn....!
Grognement étouffé de douleur quand on appuie sur les bleus et les égratignures avec ces petits bras musclés et potelés.
Armoria de Mortain a regard inquiet, léger rappel :
— Doucement, Yolanda...
— Yolanda...! Ma soeur...! Ah ! J'ai peine à en revenir.
Aimbaud la détache avec des mouvements très lents, assez faiblard, pour mieux l'observer.
Yolanda Isabel lui colle un taquet dans l'épaule. Aimbaud se mord les lèvres pour ne pas gémir.
— Tu m'as abandonnée !
Elle repose sa tête à côté de lui sur la couche pour le regarder.
— Je t'aime !
— Hmpf... Ne me tenez rigueur de rien, je vous en prie...!
Aimbaud tente de se redresser un peu plus pour lui prendre la main.
— Vous m'avez bien manquée.
— J'espère ! J'ai plein de choses à te raconter !
Armoria de Mortain intervient :
— Oui, enfin pas tout aujourd'hui...
— Pas tout ?
Yolanda Isabel tortille du nez, ça veut dire faire le tri, ça.
Aimbaud reste silencieux pendant l'échange presque souriant, juste absorbé dans le spectacle de sa yoli chérie. Et soudain il tique.
— Tiens... Vous n'êtes pas en rose.
— C'est nul le rose. Tu ne sais donc pas ? Marraine est .. elle est .. Elle n'est plus.
— Oh. Si bien sûr...
Aimbaud n'a pas la tête à parler de deuil et de massacre.
— Allons dites-moi tout de ce qu'il est advenu de vous en mon absence.
— Rien. S'il n'y avait eu Son Altesse, je serai restée désespérément seule. Enfin, si, j'ai été voir ma Dame de Jegun en Armagnac. Et je me suis faite attaquer ! Heureusement que Thibert m'a sauvée !
— Non !.. Qui ça ? Thibert ?
— Et bien oui, Thibert ! Le fils du Vicomte du Tournel !
Aimbaud plisse les yeux pour essayer de tout assimiler, assez épuisé.
— Mais n'étiez-vous pas escortée ?.. Aucune de vos amies n'était avec vous ? ARh...
Aimbaud se prend la tête.
— Enfin l'essentiel est que vous soyez sauve...
— Si.. Vite fait.. Et puis, j'ai revu Della ! Et ça, ça fait plaisir. Elle m'a racontée plein de choses ! Tu te souviens de Blanche ! Bah Blanche, elle va se marier !
Aimbaud, d'une voix inaudible :
— ... vous dites...?
— Si fait mon frère ! Elle se marie ! Soit disant qu'elle souffre ou je sais pas.. Elle est souffrante en tout cas ! Ma pauvre Blanche.. Enfin ! Je te retrouve maintenant !
Yolanda Isabel passe ses deux bras autour de la taille de son frère dou-ce-ment. Aimbaud a les oreilles qui produisent un tintement continu et paraît un peu en mode veille, côté cerveau.
— Euh... qu... dites-moi ce mariage... c'est... On sait qui c'est l'époux ?
Aimbaud est rouge vif à présent.
— Non, je ne sais pas. Della n'a pas précisé ! C'est déjà bien suffisant de savoir qu'elle va devoir épouser un inconnu. Mais 'Baud ? Tu ne vas pas bien !
Yolanda Isabel s'écarte de lui. Aimbaud peine à articuler pour cause de mâchoires trop serrées.
— ... sisisi... tout baigne, ne vous faites point de mouron...
— Mais si .. Tu souffres.. Je t'ai fait mal ? Pardon.. Pardon !
Aimbaud se refonce peu à peu dans sa paillasse, les joues cuisantes.
— Non non, ma petite vie... Jgrblm... J'accuse un peu de fatigue...
Armoria de Mortain s'est montrée très attentive sans le laisser paraître lors de l'épisode Blanche.
— Allons, Yolanda, je crois que c'est la fin de la visite...
— Mais il va mal .. Je lui ai fait mal, je crois bien.
Yolanda Isabel est toute penaude.
Armoria de Mortain sourit, gentille mais ferme.
— Il est encore faible, comme je t'avais dit... Une simple visite peut être éprouvante, dans ces cas-là, tu sais.
Aimbaud réprime un haut le coeur, le rougissement se soldant par un abominable pâlissement.
— Yolanda... ayez l'obligence de me pardonner... j'eu voulu être plus à même de rendre ces retrouvailles agréables...
Yolanda Isabel attrape la main de son frère et y dépose un baiser.
— C'est pas grave ! Je reviendrai un autre jour. Je reviendrai hein ?
Yolanda Isabel jette un coup d'oeil à Armoria. Armoria de Mortain acquiesce.
— ... avec joie.
Aimbaud mime un sourire. Armoria de Mortain retape les oreillers d'Aimbaud et le borde, très maternelle.
— Puis-je écrire ?
La figure grave, à armoria.
— Robert va vous apporter ce qu'il faut. Un peu de repos, avant, non ?
— Non ! ... Hum... (se reprend) Non merci...
— Mmm mmm. Soit.
Armoria du creux du poignet, évalue la température sur le front du garçon.
— Entendu.
Yolanda Isabel se mordille la lèvre, elle s'en veut presque la môme. Armoria de Mortain, gentiment mais fermement, pousse Yolanda vers la porte.
— Allons, jeune fille ! C'est l'heure de prendre un bon goûter !
Aimbaud suit Yolanda des yeux, silencieux mais assez bouleversé.
— Au 'voir 'Baud !
Yolanda Isabel trottine plus ou moins, ragaillardie par l'idée du goûter.
— ... aurevoir...
Aimbaud se retourne dans son lit quand tout le monde est sortit, et mord son oreiller en grognant de hargne.